Le cancer pulmonaire épidermoïde, aussi appelé carcinome épidermoïde bronchique, est un sous-type de cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC), représentant environ 20 à 30 % de l’ensemble des cancers du poumon chez l’adulte (Santé publique France). Il se forme préférentiellement dans les bronches de taille moyenne et grossit lentement, ce qui peut expliquer son diagnostic souvent tardif chez des personnes avancées en âge.
À l’heure où l’on observe un vieillissement rapide de la population française, il est notable – et préoccupant – que l’incidence du carcinome épidermoïde pulmonaire augmente non seulement avec l’âge, mais connaisse un pic particulier après 70 ans. Comprendre les raisons de cette fréquence en fin de vie, c’est avant tout questionner les interactions entre facteurs de risque historiques, le temps cumulatif d’exposition et les spécificités biologiques du grand âge.
Selon les données de l’Institut National du Cancer (INCa), l’âge médian au diagnostic de cancer du poumon en France se situe autour de 67 ans, mais pour le carcinome épidermoïde, la proportion de patients de plus de 70 ans peut avoisiner 40 %. Cette réalité s’explique notamment par :
Chez les hommes, le nombre de nouveaux cas de carcinome épidermoïde reste élevé après 70 ans, même si la part relative de ce sous-type décroît chez les femmes, au profit des adénocarcinomes (HAS).
Il est impossible d’aborder les cancers épidermoïdes du poumon sans parler de l’exposition tabagique. Ce type tumoral est bien connu pour être fortement corrélé au tabagisme prolongé : plus de 90 % des patients atteints en ont été ou en sont encore fumeurs (American Cancer Society).
Pourquoi le diagnostic survient-il si fréquemment après 70 ans ?
L’âge modifie profondément la structure et le fonctionnement du tissu pulmonaire. Sur le plan des mécanismes, plusieurs éléments favorisent la transformation de cellules respiratoires en cellules cancéreuses :
De plus, chez les personnes âgées, il est fréquent d’observer une fibrose pulmonaire discrète, une bronchite chronique ou d’autres séquelles inhalatoires qui constituent, elles aussi, un terreau physiologique défavorable.
Les cancers épidermoïdes du poumon sont caractérisés par une évolution lente, avec des symptômes qui passent souvent inaperçus ou sont attribués à tort au « vieillissement normal » ou à des pathologies respiratoires chroniques (BPCO, insuffisance cardiaque…).
Cette tendance au diagnostic tardif explique en partie la découverte du cancer à un âge avancé : il survient tard, mais il est aussi détecté tardivement, ce qui majore la proportion de patients âgés lors de la première prise en charge (EM-Consulte).
Si les cancers épidermoïdes partagent de nombreuses altérations moléculaires classiques, leur profil génétique évolue aussi en fonction de l’âge. On note davantage de mutations « classiques » type TP53, CDKN2A ou PIK3CA (NIH), mais l’âge avancé diminue la fréquence de mutations “actionnables” comme EGFR ou ALK, fréquemment retrouvées dans d’autres sous-types de cancers pulmonaires.
De plus, certains travaux ont montré que les tissus pulmonaires âgés présentent des modifications épigénétiques (altérations de la régulation de l’expression des gènes) qui favorisent la cancérogenèse, en association à l’exposition tabagique passée.
Le diagnostic d’un carcinome épidermoïde du poumon après 70 ans n’est pas un hasard statistique, mais la conjonction d’une exposition cumulée, de mécanismes biologiques liés à l’âge et d’un diagnostic tardif. Cela soulève des enjeux majeurs de prise en charge :
Des programmes gériatriques d’oncologie commencent à se structurer dans les centres experts pour y répondre (Oncorif).
Le fait que les cancers pulmonaires épidermoïdes soient particulièrement fréquents après 70 ans n’est ni une fatalité, ni une simple conséquence de l’allongement de la vie. Mieux comprendre ces mécanismes doit pousser à agir sur plusieurs plans :
L’augmentation du cancer pulmonaire épidermoïde chez les plus de 70 ans témoigne de la complexité, mais aussi de la richesse du dialogue entre médecine, société et vieillissement. La prise en charge sur-mesure que requièrent ces patients constitue un défi, certes, mais aussi une formidable opportunité d’innovation, humaine comme scientifique.